La Thaïlande garde son enquête pour elle
Le rapport sur les raisons de l'absence de réaction au tsunami ne sera pas rendu public.
Par Arnaud DUBUS
vendredi 11 mars 2005 (Liberation - 06:00)
Bangkok de notre correspondant
certains officiels thaïlandais veulent-ils dissimuler des faits relatifs au tsunami du 26 décembre pour protéger leur gouvernement de poursuites judiciaires engagées par des familles de victimes étrangères ? On peut s'interroger après qu'un expert météorologue, nommé par le Premier ministre pour mener une enquête sur les raisons de l'absence de réaction du département de météorologie, a indiqué qu'il ne publierait pas son rapport pour ne pas nuire au pays.
«Je ne le révélerai pas, je ne peux pas le faire. Le rapport pourrait ne jamais être publié. Parce que c'est maintenant un problème de poursuites judiciaires et que cela pourrait causer beaucoup de dommages», a déclaré Smith Thammasaroj au quotidien thaïlandais The Nation. Soixante membres de familles de victimes de France, d'Autriche, d'Allemagne, des Pays-Bas et de Suisse ont déposé plainte le 4 mars auprès de la justice new-yorkaise contre les gouvernements américain et thaïlandais pour n'avoir pas donné l'alerte.
Ce même expert devenu localement célèbre depuis la catastrophe car il avait tenté, en vain, au milieu des années 90, d'alerter le gouvernement contre le risque éventuel d'un tsunami estime que beaucoup de vies auraient pu être sauvées si le département météorologique s'était mieux préparé à un tel risque naturel. Selon des informations publiées deux jours après le raz de marée dans The Nation, le département météo avait appris vers 8 heures du matin le 26 décembre qu'un tremblement de terre de 8,1 sur l'échelle de Richter avait eu lieu près de l'île indonésienne de Sumatra.
Un officiel raconte qu'une réunion s'est alors tenue entre experts du département : l'éventualité de lancer une alerte au tsunami a été évoquée, mais rejetée. «Le facteur le plus important était que c'était la haute saison touristique et que les hôtels étaient pleins à 100 %. Si nous avions lancé une alerte pour rien qui aurait mené à une évacuation, que se serait-il passé ?» expliquait cet officiel cité par le journal.