Afrique et Cambodge
Le 8 juillet 2005
Maintenant tout le monde sait que l'Afrique, en particulier subsaharien, est un continent sinistré. Après plus de trente ans d'aides, les peuples africains vivent toujours dans l'ignorance, la maladie, le sida et la misère. Où sont parties les richesses fabuleuses de l'Afrique : pétrole, gaz, diamant et or en particulier ? Qui en profite ? En tous les cas pas aux peuples africains. Les immenses aides ne servent-elles pas à remplir les poches des gouvernements corrompus ? Comme les Mobutu par exemple ? L'histoire se répète-t-elle, cette fois au Cambodge ?
En Afrique, on ne forme qu'une petite minorité d'instruits. Les plus doués vont s'installer dans les pays riches. Ceux qui restent exercent la dictature sur le peuple d'analphabètes. Ils sont les plus corrompus de la terre et bradent les richesses africaines aux pays riches.
Pourtant tout le monde sait qu'un pays ne peut se développer qu'avec un peuple instruit. Les richesses créées par le cerveau sont beaucoup plus précieuses et plus fondamentales que les richesses naturelles. Les exemples les plus convaincants sont représentés par le développement rapide de la Corée du Sud, du Japon et de Taiwan. Avec un peuple instruit, toutes les richesses naturelles sont bien exploitées et mieux utilisées pour le développement économique et culturel. En agriculture, les paysans instruits savent mieux comment augmenter la production et la diversifier au mieux des intérêts de la nation. D'autre part, une industrie de haut niveau ne peut jamais se développer chez un peuple d'analphabète. Tout le monde sait que le développement d'un pays passe toujours par la puissance de son industrie en particulier l'industrie de pointe.
A Taiwan, après la victoire de Mao, ce sont les Etats- Unis qui ont imposé l'adoption de la réforme agraire suivie de la consolidation et de la pérennité de la propriété privée de la terre. Parallèlement, l'enseignement est pris au sérieux pour la formation rapidement des jeunes en toutes disciplines pour moderniser l'économie et l'administration.
Une nation n'existe que si on donne à l'enseignement en langue nationale, la priorité des priorités. Il n'y a pas dans le monde une nation indépendante et prospère avec un peuple d'analphabètes.
Au Cambodge, après près de quinze ans d'aides massives, le peuple cambodgien vie toujours dans l'ignorance, la maladie et la misère. La dictature, la culture de l'impunité et la corruption effrénée continuent à faire leurs ravages. Les richesses du pays sont dilapidées.
Dans corruption, il y a corrompus et corrupteurs. Jusqu'à présent on ne parle que des corrompus et jamais un mot des corrupteurs. Pour la drogue, on prend soin des drogués et on se bat contre les trafiquants de la drogue. Pourquoi au Cambodge on ne parle jamais des corrupteurs qui possèdent des montagnes de millions de dollars ? On parle de la déforestation. Mais qui achètent le bois du Cambodge ? Maintenant on sait que le Cambodge possède des richesses importantes en hydrocarbure. Qui vont en profiter ? Que reste-t-il pour le peuple cambodgien ?
L'enseignement est la base fondamentale pour former la solidarité nationale. Il n'y a jamais de solidarité nationale dans un peuple d'analphabètes. Au Cambodge, l'enseignement est le dernier des soucis des pays donateurs d'aides. Les manuels scolaires sont inadaptés, pas de grammaire, ni de notion de géographie et d'histoire. Le métier de professeurs n'est pas honoré. Il est classé au plus bas de la société etc. Aucun livre destiné à la lecture, à exciter la curiosité des enfants, à la lecture des adultes, à la connaissance de la culture mondiale etc. Pas de cartes, ni de livres d'histoire générale etc. Plus de la moitié des Cambodgiens sont toujours des analphabètes. L'industrie de l'imprimerie reste toujours à la traîne.
Comment dans ces conditions peut-on espérer développer quoi que ce soit au Cambodge ? En plus sous une dictature obscurantiste et corrompue, plus que durant le règne de Mobutu ?
On ne peut développer la connaissance d'un peuple que par la multiplication des livres en langue nationale, en particulier des traductions des livres de la culture mondiale. Le développement de la connaissance d'un peuple ne peut se faire que quand ce peuple peut exprimer toutes les nuances de la pensée mondiale dans sa langue maternelle.
D'autre part cette langue devient le lien entre tous les membres de la communauté nationale. La solidarité nationale ne peut se faire que par la communauté de langue, base nécessaire à la construction d'une économie saine et solide. C'est ce qui caractérise toutes nations indépendantes du monde (1)
Certes les langues étrangères sont très importantes, elles sont nécessaires pour les recherches approfondies. Il est donc important de les apprendre aux enfants assez tôt. Mais une langue étrangère ne peut jamais remplacer une langue maternelle. La langue maternelle contient 'affection et l'amour de la mère.
Au Cambodge, malgré les conditions extrêmement difficiles, il y a des professeurs consciencieux qui acceptent de porter leur attention à des élèves doués. Il y a toujours un petit nombre de ces jeunes qui travaillent dans des conditions extrêmement difficiles pour aider d'autres jeunes à émerger. L'industrie de l'imprimé, se développe sans très peu d'aides extérieures. Des traductions anciennes sont rééditées. Cela prouve qu'il y a des lecteurs.
Un autre exemple. La lettre du Roi Père sur les frontières a reçu le soutien unanime de nos compatriotes. Puis devant les menaces du pouvoir, les langues se taisent. Mais au Cambodge un groupe de jeunes intellectuels, vont à nos frontières de l'Est et font des relevées des empiètements vietnamiens avec des relevés des coordonnées terrestres. Ces jeunes vont publier une brochure pour illustrer ces empiètements vietnamiens. En plus ils ont relevé de la misère du peuple cambodgien ignorant face au développement économique des Vietnamiens instruits.
Car comment mobiliser le peuple, si nos compatriotes au Cambodge et hors du Cambodge ne possèdent aucune carte sérieuse sur notre pays, avec les noms des villages frontaliers et des frontières maritimes que nous revendiquons ? D'autre part, rappelons que le livre de Sarin Chhak, traduit en cambodgien et imprimé en 2002, est censuré par le pouvoir.
Pourquoi, à l'étranger, nos compatriotes n'arrivent pas à s'associer pour imprimer une telle carte du Cambodge, pour que nos compatriotes puissent avoir une image concrète de la mère patrie ? Pour se rendre compte de la réalité des empiètements vietnamiens ? Pour que nos enfants connaissent notre pays ? Quel pays reste sans carte sérieuse comme le Cambodge ?
Pourquoi, aucune formation politique cambodgienne ne parle sérieusement de ce problème crucial qui conditionne l'avenir de notre nation que représentel 'enseignement et de l'éducation du peuple et surtout des jeunes ?
Notes :
(1) « L'imaginaire national. Réflexions sur l'origine et l'essor du nationalisme » par Benedict Anderson, Ed. La découverte, Paris 2002. Remarque, l'auteur ignore l'histoire et l'origine de la langue cambodgienne.
Et « Histoire et pouvoir de l'écrit » Par Henri-Jean Martin, Ed. Albin Michel, Paris 1988.
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