Deux jours après les raz-de-marée qui ont ravagé les côtes de huit pays d'Asie, le bilan était de plus de 27.000 morts, mais il pourrait bientôt dépasser 40.000 morts et 30.000 disparus, l'Indonésie annonçant à elle seule un bilan probable de 21.000 morts ou davantage.
Le nombre des touristes étrangers figurant parmi les victimes du cataclysme ne cessait lui aussi de croître. Rien qu'en Thaïlande, plus de 700 étrangers ont péri, selon les autorités.
Confrontées à "une catastrophe sans précédent", selon les termes d'un responsable de l'ONU, en raison du nombre des pays ravagés simultanément, l'ONU et la Croix-Rouge s'efforçaient de coordonner les aides internationales qui affluent vers les régions sinistrées.
Une réunion était prévue mardi à Genève entre les gouvernements des pays donateurs, les pays victimes et les organisations de secours.
Le nombre des personnes déplacées est très élevé. "Il y a un million de personnes déplacées au Sri Lanka, 29.000 autres en Thaïlande et environ un millier en Inde", a déclaré à Genève une porte-parole de la Croix-Rouge, Marie-Françoise Borel.
Les raz-de-marée qui ont parcouru l'océan Indien dimanche ont été déclenchés par un séisme de magnitude 9 sur l'échelle ouverte de Richter au large de l'Indonésie, qui a précipité des murailles d'eau sur des milliers de kilomètres de côtes.
Vers 08h00 GMT mardi, le nombre des morts confirmés était de plus de 27.000, selon les chiffres provisoires fournis par les pays touchés.
Mais il semblait devoir encore augmenter très fortement en raison d'une hausse brutale du bilan probable en Indonésie.
"Le bilan précis n'est pas encore disponible, mais je l'estime à entre 21.000 et 25.000", a déclaré le vice-président indonésien Yusuf Kalla, cité par l'agence de presse officielle Antara. Auparavant, le bilan pour l'Indonésie était de quelque 4.700 morts.
Le vice-président se trouvait à Medan, dans le nord de l'île de Sumatra, d'où il coordonnait les opérations de secours.
La nouvelle estimation indonésienne, si elle est confirmée, portera le bilan général au-delà de 40.000 morts.
En Inde, quelque 8.500 morts étaient recensés mardi, dont 4.500 dans l'Etat du Tamil Nadu et 4.000 autres dans les îles Andaman et Nicobar, archipel indien situé dans le golfe du Bengale, non loin de l'épicentre du séisme. Le président indien A.P.J. Abdul Kalam a parlé d'une "tragédie nationale".
De plus, quelque 30.000 personnes sont portées disparues dans les îles Andaman et Nicobar.
Au Sri Lanka, le bilan vers 08h00 GMT était de près de 12.000 morts et 2.000 disparus. Le gouvernement et l'armée ont déclaré que 10.588 corps avaient été dénombrés, dont ceux de 70 étrangers. La rébellion tamoule a indiqué qu'elle avait recensé 1.372 morts dans les parties du nord de l'île qu'elle contrôle et 2.000 disparus.
En Thaïlande, les autorités ont donné un bilan provisoire de près de 1.000 morts dont quelque 790 touristes étrangers. "Selon les derniers chiffres, nous avons plus de 990 morts confirmés, environ 200 Thaïlandais et le reste des étrangers", a déclaré le vice-ministre de l'Intérieur Sutham Sangprathum. "Mais d'après ce que j'ai vu, le bilan va encore augmenter", a-t-il averti.
Il y a eu 60 morts en Malaisie, 56 en Birmanie, 52 aux Maldives.
Les pays extérieurs à la zone touchée qui comptaient mardi le plus grand nombre de ressortissants officiellement décédés dans les raz-de-marée étaient la Grande-Bretagne (15), l'Italie (13), la Norvège (13), la Suède (une dizaine), les Etats-Unis (
, les Philippines (
, l'Australie (6) et la France (6).
Des centaines de touristes étaient portés disparus ou n'avaient pas pu être contactés et recensés en raison du chaos régnant dans certaines régions.
Les pays étrangers rapatrient des milliers de vacanciers partis passer les fêtes de fin d'année dans les paradis touristiques des Maldives, du Sri Lanka, de Phuket ou de Phi Phi, en Thaïlande, qui ont été submergés en quelques secondes par des murs d'eau.
Plusieurs pays étrangers ont aussi commencé à envoyer des avions chargés de vivres, de médicaments et des équipes de secours.
Un responsable des questions humanitaires de l'ONU, Jan Egeland, a déclaré que les raz-de-marée avaient causé pour "des milliards de dollars" de dégâts et allaient nécessiter la "plus grande opération" d'aide humanitaire de l'histoire des Nations unies.
Les Etats-Unis ont annoncé qu'ils allaient envoyer quelque 15 millions de dollars d'aide immédiate. Le Japon a annoncé qu'il offrait 30 millions de dollars. La Banque mondiale a offert son aide aux pays dévastés.
Sur des milliers de kilomètres de côtes, les mêmes scènes de désolation et de désespoir se répétaient.
"Mon mari est mort. Je vous en supplie. Aidez-moi, je ne sais pas quoi faire", implorait une touriste allemande à Phuket. Plus de 30 cadavres gonflés étaient allongés par terre: des enfants, des vieillards, des touristes seulement vêtus d'un maillot de bain. D'autres corps continuaient d'arriver.
Dans le sud du Sri Lanka, des corps d'hommes, de femmes, d'enfants restaient accrochés dans les arbres. D'autres jonchaient le rivage.
En Inde, à Cuddalore, l'un des villages les plus touchés du Tamil Nadu, les rescapés creusaient des fosses à même le sable pour enterrer les cadavres. L'odeur de la mort flottait loin à l'intérieur des terres.
A Banda Aceh, dans le nord de l'île indonésienne de Sumatra, des centaines de corps étaient alignés dans l'attente d'être identifiés.
Face à l'ampleur de la tragédie, plusieurs pays ont décrété l'état d'urgence pour faciliter le recours à l'armée et appelé à l'aide internationale.
Mais les secours peinaient à s'organiser. La tâche était en outre compliquée par les difficultés rencontrées pour atteindre des régions reculées, comme en Inde, aux Maldives, à Sumatra, ou par le fait que des zones sinistrées sont sous le contrôle de rébellions armées.
A Aceh, l'armée indonésienne a appelé les rebelles à un cessez-le-feu pour acheminer les secours. Au Sri Lanka, une partie du nord et de l'est du pays est sous le contrôle des rebelles tamouls.
Ce pays a engagé une opération massive de l'armée et de la police, aidées par plus de 20.000 volontaires. Des renforts ont été envoyés vers le sud et l'est pour dégager les routes, afin de faire passer les secours et évacuer des hôpitaux les corps qui s'y entassent.
La police a imposé un couvre-feu dans de nombreuses zones pour empêcher les pillages.
Signe de la puissance exceptionnelle du phénomène, les vagues meurtrières sont parvenues sur la côte est de l'Afrique. En Somalie, 40 corps de pêcheurs ont été retrouvés, et 60 autres pêcheurs sont portés disparus et considérés comme morts. Au moins 10 personnes sont mortes en Tanzanie et une au Kenya.