La multiplicité des acteurs humanitaires engagés dans cette crise complique encore la donne. Ici, une ONG cherche des bénévoles pour le nettoyage de la ville de Bang Tao, à Phuket en Thaïlande.AP
Gérer la déferlante humanitaire
Tous sont mobilisés. Les fonds ne sauraient tarder. Maintenant, le challenge est de coordonner l’aide d’urgence mais aussi, à plus long terme, la reconstruction.
Sur le papier, 6 milliards de dollars d’aides publiques et près de 4 milliards de dollars de dons privés ont été promis pour les victimes des tsunamis. Si ces promesses se concrétisent, c’est exceptionnel. Le challenge consiste maintenant à coordonner le tout et c’est aussi à cela que sert la conférence de l’ONU qui réunissait hier et aujourd’hui à Genève pays donateurs et ONG de tous bords.
«Assurer la cohérence de toutes ces actions, c’est véritablement le défi à venir», selon Sergio Piazzi, chef des relations extérieures d’OCHA, l’agence de l’ONU mandatée pour coordonner toutes les crises humanitaires.
Engorgement humanitaire
Si le manque de coordination est souvent l’un des écueils du monde humanitaire — doublon ici et vide là-bas —, l’ampleur de la catastrophe en Asie du Sud renforce encore plus les défis habituels. Une zone de près de 7000 kilomètres touchée, douze pays affectés et pas moins de cinq millions de personnes ayant besoin d’assistance.
L’autre problème, c’est la multiplicité des acteurs humanitaires dans cette crise. Gouvernements des pays concernés, Etats donateurs, organismes des Nations Unies, ONG et bénévoles improvisés: on assiste à un véritable engorgement sur le terrain. Le personnel au complet de l’ONU est d’ailleurs mobilisé. OCHA, qui a demandé aux différents acteurs d’informer le système onusien des opérations diverses et multiples, admet une certaine confusion. «Nous ne sommes pas au courant de toutes les initiatives. Et il faut être sûr que ceux qui en ont besoin reçoivent ce qui leur faut», explique Piazzi.
Définir les priorités
Les Nations Unies tentent de dresser une carte géographique opérationnelle en essayant d’indiquer les priorités afin d’envoyer l’aide adéquate où elle est nécessaire. Pour cela une division des responsabilités par secteur a été établie: l’OMS pour la santé, l’UNICEF pour les enfants et l’eau — une des priorités principales — et le PAM pour la logistique. «Il faut éviter que, pris dans l’enthousiasme, on envoie des choses qui ne sont pas nécessaires immédiatement ou qui sont difficiles à utiliser. Par exemple, des médicaments dont les indications sont écrites dans des langues impossibles à comprendre par les populations locales.»
Pour Marie-Françoise Borel, porte-parole de la Fédération de la Croix rouge et du Croissant-Rouge à Genève, le problème vient de l’improvisation. «Certaines ONG viennent spontanément sans s’annoncer. Cela peut engorger le système de logistique. On va, par exemple, se retrouver à tous les coins de rue avec un dispensaire dont personne n’avait besoin. Et un peu plus loin, où il existe un réel besoin, il n’y en aura pas», explique-t-elle.
Des défis logistiques sans comparaison
Il faut donc impérativement passer par les autorités nationales qui ont la responsabilité de coordonner les actions dont l’ONU est censée renforcer la capacité. Pas toujours évident. Surtout comme dans le cas de l’Indonésie où la moitié des fonctionnaires de l’administration et de la police ont péri dans le séisme. Pour faciliter l’organisation de l’aide, les Nations Unies conseillent plutôt aux acteurs de verser de l’argent aux agences spécialisées qui font leur shopping sur place ou dans la région. «Cela a le double avantage de réduire les problèmes logistiques et de mettre les forces disponibles localement à contribution», explique Piazzi. Les dons en espèces permettent en effet de soutenir les économies locales et de ne pas entraver leur redémarrage. Un souci qui s’avérera particulièrement criant tout au long de la longue période de reconstruction qui suit l’urgence.