Deux mois après le raz-de-marée, Geneviève Monney quittait son emploi et sa vie à Lausanne pour se rendre, seule, en Thaïlande afin d'aider les sinistrés. En quelques mois, elle est devenue une figure de la vie locale de Kamala et de sa région.
A Kamala, sur l'île de Phuket, Geneviève Monney fait figure d'"extraterrestre" de l'aide humanitaire. Face aux bataillons d'ONG et de membres de projets privés ayant investi les côtes, cette Suissesse âgée de 60 ans se débrouille en effet seule pour organiser ses actions à destination des sinistrés du 26 décembre 2004.
En mars dernier, interpellée et touchée par les terribles images d'une région qu'elle connaissait bien pour s'y être rendue à de maintes reprises, Geneviève décidait de partir pour aller aider les populations locales, munie de ses seules économies. "Ca m'a travaillé longtemps. Les Thaïlandais sont vraiment un peuple agréable. Puis je me suis finalement décidé à quitter mon emploi. J'ai pris ma valise et mon argent" explique-t-il. Neuf mois après, elle "ne regrette rien", bien au contraire.
Parrainage
Le moins que l'on puisse dire, c'est que ces neuf mois ont en effet été bien remplis. Son point d'attache pour le début de l'aventure : des amis résidant à Patong. Ils passent le message sur cette drôle d'Européenne souhaitant aider les victimes du tsunami. Accueillie avec chaleur, Geneviève commence alors son altruiste travail. Très rapidement, elle s'installera à Kamala, un village d'environ 2 000 habitants situé à quelques kilomètres au nord de Patong et de ses plages pour touristes occidentaux. "Comme Patong, il avait été totalement dévasté. Mais, très peu médiatisé, il n'avait reçu aucune aide". En à peine un mois, l'équipée permet d'aider à la reconstruction d'une maison ou encore à l'achat d'un moteur de bateau de pêche.
Mais le projet semble malheureusement tourner court. En manque d'argent, Geneviève, fatiguée mais toujours volontaire, doit rentrer en Suisse. Elle ne laisse cependant pas tomber l'affaire. Elle se lance donc dans une collecte de fonds. Son enthousiasme convainc son ancienne entreprise, filiale d'une grande compagnie d'assurance, qui la parraine via son programme de mécénat. Elle récolte ainsi 70 000 euros, auxquels viennent s'ajouter 30 000 euros de dons privés obtenus via l'aide de ses amis.
"Je suis assistante sociale et chef d'entreprise"
Fin juin, Geneviève est de retour à Kamala où elle loue une maison. Et, sur l'île de Phuket comme sur toute la côte, dans les villages oubliés car délaissés par les touristes, elle continue son travail de sape : rachats d'habits, distribution de nourritures aux plus démunis, financement de la reconstruction d'un restaurant, achat d'un bateau pour un pêcheur... Et œuvre même à la reconstitution de l'équipe de football de Kamala !
Bref, elle apprend, sur le tas, les métiers d'assistante sociale et de chef d'entreprise. "Il faut gérer les stocks, s'assurer de la fabrication, remplir les papiers pour l'administration. Ca me prend facilement deux heures par jour" souligne-t-elle. Après avoir dans un premier temps tout dirigé elle-même, Geneviève bénéficie désormais du soutien d'une assistante thaïlandaise. "En fait, même si tout le monde veut m'aider, c'est très difficile de trouver les gens adéquats car ils n'ont pas forcément ma rigueur. Or je souhaite que tout soit transparent vis-à-vis des donateurs. Pour chaque projet, j'exige une facture, un devis, même si je perds du temps" fait-elle remarquer.
"Mamma arrive, on va pouvoir partir en mer"
Geneviève avec le maire de Kamala
"Très fière" de son travail, Geneviève regrette le manque de coordination des ONG. "Récemment, nous sommes allés à la frontière birmane dans un petit village d'à peine 50 familles. Avant nous, elles n'avaient vu aucun humanitaire étranger depuis la catastrophe".
Ou pointe encore une situation absurde où l'on a redonné des bateaux à des pêcheurs, en oubliant leurs filets. Or sans filet, pas de pêche. "Nous avons donc mis en place un atelier pour en fabriquer. C'est peut-être jusqu'à présent mon plus beau projet. Il a fallu que j'apprenne à les faire. Mais quelle joie quand les gens ont dit : 'Mamma arrive, on va pouvoir partir en mer'".
Aujourd'hui, Geneviève est devenue une personnalité appréciée à Kamala et aux alentours. "Ils m'appellent tous la 'mamma', aussi bien les jeunes que les vieux. Quand il me croise, le maire vient me parler, m'offre à boire, me raconte ses déboires avec l'administration pour l'arrivée des fonds". Pour l'instant, ses réserves financières lui permettent en théorie de rester sur place encore environ six mois. "J'espère que mon périple pour les Thaïlandais va continuer. Ils le méritent. Après, on verra. Je rentrerai sûrement en Suisse" conclut-elle.
http://www.espritdefamillethailande.ch