Ratanakiri - Le trafic de latex s’intensifierait
10-02-2006
Cambodge Soir - Le trafic de caoutchouc dans la province de Ratanakiri aurait monté d’un cran. C’est le constat que fait Tai Seng, président de la compagnie éponyme, à la tête d’une concession d’hévéaculture de 2 300 hectares. Selon lui, il perdrait chaque mois près de deux cents tonnes de latex. L’accord signé prévoit que les habitants et fonctionnaires de cette province vivant de la saigne des hévéas puissent poursuivre leur activité au sein de la concession à la condition qu’ils revendent leur récolte en exclusivité à Tai Seng.
“Depuis longtemps, la concession souffre de vols. Mais le trafic s’est vraiment intensifié. Jusqu’en août dernier, les pertes s’élevaient à quelques dizaines de tonnes seulement par mois. Aujourd’hui, ce sont plutôt quelque 200 tonnes de latex qui nous passent sous le nez”, s’irrite le patron, qui accuse sans détours des gendarmes et des militaires de faire le coup.
“Ces délinquants sont tous armés, ce qui rend difficile l’intervention des autorités. Et que peuvent faire les gardes de sécurité de ma compagnie contre des hommes armés, quand eux ne le sont pas?”, explique Tai Seng relevant que les criminels qui auparavant opéraient toujours à la faveur de la nuit, n’ont aujourd’hui plus de scrupules à commettre leurs délits en plein jour. Pour le directeur de la concession, cette augmentation du trafic est à imputer à l’arrivée dans la province d’intermédiaires de Kompong Cham qui, discrètement, font le déplacement pour venir acheter directement aux voleurs. Et, ajoute-t-il, la fermeture provisoire à proximité de la concession d’un poste du Comité de lutte contre le trafic illégal de caoutchouc n’arrange rien. Dans une récente course-poursuite avec des trafiquants, les fonctionnaires ont embouti leur véhicule et deux taxis, la résolution de ce problème ayant causé une clôture du poste.
Pen Bonnar, enquêteur de l’ONG Adhoc dans la province, informé de la plainte de Tai Seng, précise que cette situation n’occasionne pas seulement une perte pour la compagnie mais également pour l’Etat à qui la société doit reverser une partie de ses bénéfices. Si le trafic se maintient à une aussi grande échelle et que rien ne parvient à le stopper, Tai Seng prévient qu’il ne sera pas en mesure de payer en 2006 à l’Etat le montant fixé dans le contrat, soit 200 000 dollars. “Si le gouvernement ne m’aide pas, c’est simple, je n’aurai plus d’argent. Pourtant, j’ai les preuves de ce que j’avance...”, affirme-t-il, disant préparer actuellement une plainte qu’il déposera au ministère de l’Agriculture.
Le nouveau gouverneur de la province de Ratanakiri, Muong Poy, semble prendre peu à cœur l’affaire. Il précise qu’une réunion sur ce sujet a été tenue jeudi avec les représentants de l’administration forestière, de la gendarmerie et de la police qu’il a sommés de renforcer leurs interventions. “Cependant, cet état de fait est aussi dû à la compagnie elle-même. Il faut qu’elle s’aide. Je ne comprends pas pourquoi elle ne surveille pas mieux sa concession”, fait-il remarquer, promettant de rouvrir le poste de lutte contre le trafic de caoutchouc près de la concession.
Ung Chansophea