La municipalité appelle les ouvriers à dénoncer leurs collègues grévistes
03-07-2006
Cambodge Soir - Le Siorc a beau avoir annulé la grève annoncée pour aujourd'hui, la municipalité de Phnom Penh a décidé d’établir un plan antigrève - “pour les jours qui suivent, et pour l’avenir” - particulièrement élaboré puisqu’il invite les ouvriers eux-mêmes à dénoncer leurs collègues grévistes aux autorités. Vendredi, les chefs de sept arrondissements de la capitale et près de 300 ouvriers de la Fédération des syndicats khmers de Chuon Momthol, réputée proche du gouvernement, ont été invités à entendre les nouvelles instructions de Pa Socheatvong, vice-gouverneur, à propos du droit de manifester.
La municipalité cherche à tisser des réseaux d’information au sein même des usines et demande aux ouvriers d’alerter la police en cas de projet de grève. “A partir de maintenant, tous ceux qui distribuent des tracts incitant à faire grève devront répondre de leurs actes devant la loi. Désormais, frères et sœurs ouvriers, vous devez collaborer avec nous”, a lancé le vice-gouverneur.
Quant à la police municipale, elle est invitée à contrôler étroitement les espaces publics théoriquement prévus pour accueillir les manifestations afin d’empêcher tout regroupement, ainsi qu’à prévenir les camionnettes qui transportent les ouvriers et les détenteurs de haut-parleurs qu’ils s’exposeront à des poursuites s’ils participent d’une manière ou d’une autre à un mouvement social. “La paix et la stabilité politique sont essentielles. Les Khmers se sont battus pendant 500 ans et ont aujourd'hui la chance de vivre en paix. Il ne faut pas laisser les opportunistes détruire cet acquis pour leurs ambitions politiques”, a-t-il fait valoir avant de préciser que ces mesures ne valaient pas que pour le 3 juillet, mais aussi pour “le 8 ou le 9”, et pour l’avenir. Il a distribué à la fin de la réunion 3 millions de riels aux ouvriers (3 000 riels chacun), et annoncé qu'il en ferait autant pour les chefs de police de plusieurs arrondissements.
Chea Mony, président du Siorc, estime que ces mesures constituent une violation flagrante du droit de manifester. “Le fait que la mairie travaille avec un syndicat montre bien la collusion qui existe entre les autorités et ce syndicat”, a-t-il déclaré.
Le vice-gouverneur n’a d'ailleurs pas épargné le président du Siroc, pas plus que son collègue Rong Chhun, président de l’Association indépendante des enseignants du Cambodge. Les deux organisateurs de la grève initialement prévue aujourd'hui sont accusés, derrière leurs apparentes revendications sociales, d’avoir des visées politiques. “Leurs activités seront exploitées ultérieurement par des hommes politiques qui ont d’ailleurs déjà entamé leur campagne électorale. Ils vont vous utiliser pour réaliser leurs ambitions”, a-t-il asséné.
Leang Delux