Témoignage - Quatre étudiants cambodgiens racontent leurs derniers jours à Beyrouth
25-07-2006
Cambodge Soir - Ils sont quatre étudiants aux anges d’avoir retrouvé leurs pénates. Inscrits en deuxième cycle à Beyrouth, au Liban, grâce à une bourse de l’Agence universitaire de la francophonie (AUF), ils devaient quitter le pays du cèdre le 16 juillet, leur cursus étant terminé. Impatients de rentrer au Cambodge, ils ont à plusieurs reprises dès fin juin tenté d’avancer leur date de retour. Mais à cette période de l’année, les avions sont pleins à craquer. Puis les bombardements ont commencé, condamnant l’aéroport international de Beyrouth. Ces jeunes, dans la vingtaine et qui partageaient le même appartement, racontent ce qu'ils ont vu de l'offensive israélienne.
“Le 13, quand les premiers bombardements ont retenti, je ne me suis pas trop inquiété. Mais quand j’ai compris ce qui se passait autour de moi après avoir regardé les informations à la télé alors là je me suis dit que ça s’annonçait mal pour notre départ. Paniqué, j’ai tout de suite contacté le responsable de l’AUF.” Hun Vanputhiravong, étudiant en mathématiques, répète du haut de ses 22 ans n’avoir “jamais vu ça auparavant”. “Notre immeuble tremblait au fur et à mesure que les bombes étaient larguées. On n’osait plus sortir, et quand on le faisait, on ne quittait pas le quartier. Au premier boum, tous les Libanais sont sortis sur leurs balcons. On lisait de la tristesse sur leurs visages. Mais quand on est allé à leur rencontre, c’est la colère qui dominait. Ils nous disaient : ‘Israël affirme qu’elle veut supprimer le terrorisme mais c’est pas vrai, ce qu’elle veut, c’est anéantir le peuple libanais’. D’autres se disaient désespérés, expliquant que Beyrouth venait juste de se reconstruire au cours de la dernière décennie, et ce au prix d’un lourd endettement.”
Srey Sophornvy, 23 ans, une colocataire de Vanputhiravong, s’est sentie plus rassurée que lui. “Il est vrai que c’était l’effroi partout en ville. Mais dans notre quartier les habitants n’avaient pas l’air aussi inquiets qu’ailleurs. Et pour cause. Ils se disaient qu’ils seraient épargnés par les attaques d’Israël car ils sont ici à majorité chrétienne. Comme eux, je me disais qu’on risquait moins ici vu que c’est avec les musulmans qu'Israël a des problèmes”, explique-t-elle calmement. Un sang froid que n’a pas eu Born Sokly, 22 ans, qui avoue avoir vécu ces quelques journées dans l’angoisse la plus profonde. “J’en ai perdu le sommeil, je ne quittais plus du regard le ciel, me demandant quels autres engins de mort allaient faire leur apparition. La situation n’était pas évidente pour nous. Nous n’avions de contacts qu’avec des Libanais francophones, ne parlant pas un mot d’arabe. Il n’était plus possible de prendre l’avion et la rumeur courait que la route menant en Syrie avait été coupée”, se souvient-elle encore sous le choc.
Grâce à l’aide du responsable de l’AUF, nos quatre jeunes ont finalement embarqué le 16 juillet dans un taxi qui les a emmenés en Syrie d’où ils ont pu rejoindre en avion le Cambodge, au terme de quelques détours. UC