Société - La police démantèle un réseau de production de films pédophiles
24-08-2006
Cambodge Soir - La police du bureau central de lutte contre le trafic d’êtres humains a présenté hier à la presse quatre étrangers suspectés d’actes de débauche (un cinquième étant actuellement à l’hôpital) ainsi qu’une collection d’objets saisis à leurs domiciles, dont des godemichés, une vingtaine de cassettes vidéos pornographiques ou encore des fouets. Un retraité allemand âgé de 61 ans a tout d’abord été arrêté dimanche. Il est depuis hospitalisé à l’hôpital Calmette après avoir tenté de s’enfuir à la vue des policiers en sautant par la fenêtre de son appartement, situé à plusieurs mètres du sol. Ses jours ne sont pas en danger.
Une vingtaine d’heures de films pédophiles a été découverte chez lui, et a permis d’interpeller un deuxième ressortissant allemand, identifié dans certaines scènes filmées, qui est professeur d’anglais dans un établissement privé de la capitale. Ce deuxième suspect a été arrêté le lendemain chez lui, avec trois Viêtnamiens qui se trouvaient à ses côtés. L’un d’eux a avoué à la police fournir aux Allemands de jeunes compatriotes, des filles âgées de 10 à 14 ans. Ces dernières, qui recevaient par “séance” la somme de 30 dollars dont 10 reversés à leurs proxénètes, ont raconté que les relations sexuelles qu’elles avaient avec les deux Allemands se déroulaient systématiquement sous l’œil d’une caméra. Les suspects ont été présentés hier à la cour municipale de Phnom Penh où ils ont commencé à être interrogés par le procureur adjoint.
“Nous pensons que cette opération est un véritable succès pour les autorités qui surveillaient le principal suspect depuis longtemps. Grâce à notre vigilance et à la collaboration des voisins et des motodops de leur quartier, nous avons pu les confondre. Mais je souhaiterais que ceux qui louent des maisons à des étrangers à Phnom Penh signalent aux autorités locales leurs agissements si par exemple ils emmènent chez eux des enfants cambodgiens. Nous devons tous participer à la répression de ces délits”, a encouragé Kao Thea, chef adjoint du bureau central de lutte contre le trafic d’êtres humains, avant de conclure que “les preuves à disposition de la police sont suffisantes pour les inculper”.
Pour Christian Guth, conseiller de l’Unicef pour la lutte contre le trafic et l’exploitation sexuelle des enfants auprès du ministère de l’Intérieur, “c’est la première saisie de cette ampleur dans le pays et cela montre une aggravation du phénomène de production de films pédopornographiques destinés à la Toile”. Il ajoute que si “l’enquête démarre ici, au Cambodge, elle s’étendra à d’autres pays dont l’Allemagne” d’où sont originaires les deux principaux suspects. “On est en présence d’un réseau de vente de films pornographiques sur internet, et peut-être sur VCD ou DVD. C’est une assez grosse affaire”, juge-t-il.
“C’est la première fois dans l’histoire qu’on a un produit illégal qui est facile à dupliquer, ad libitum et gratuitement. Autant dire que l’industrie pédopornographique est très lucrative”, explique un spécialiste de la protection des enfants sur internet. Ce commerce prospère à vive allure comme le relevait déjà le rapport du Congrès international sur l’exploitation sexuelle des enfants (CSEC), qui s’est tenu en 2001 à Yokohama. Les experts pressentent que l’arrivée d’internet n’ouvre pas seulement “un nouveau et large marché en expansion” pour la pédophilie mais stimule également la demande pour “des produits impliquant des niveaux de dépravation et de corruption plus importants qu’avant”.
Duong Sokha et Stéphanie Gée