Le cerf-volant sous l’oeil méfiant des autorités
24-08-2006
Cambodge Soir - La saison du cerf-volant est ouverte. Ces oiseaux de papier ont pris d’assaut les airs quand le ciel phnompenhois veut toutefois bien se montrer clément. “Le mien vole plus haut que les autres”, exulte un garçon, engagé avec ses amis dans une joute avec un sérieux quasi cérémonial. Les quelques espaces verts que compte la capitale ne sont en fin de journée, surtout le week-end, que parterres grouillant de gens sous un ciel multicolore. “Quand on vit à Phnom Penh, il n’y a guère d’endroits où pratiquer le cerf-volant. On s’entasse donc tous dans les mêmes aires. Ce sont mes enfants qui m’entraînent...”, explique ce père de famille.
Pourtant, la capitale a connu des temps, pas si lointains, où le cerf-volant était maudit. Banni. On ne voyait plus la queue d’un seul. La municipalité en avait complètement interdit le vol, avançant alors diverses raisons, parmi lesquelles l’influence néfaste que ces oiseaux de papier pouvaient avoir sur les conducteurs en les déconcentrant. Le cerf-volant a-t-il ainsi retrouvé grâce aux yeux des autorités?
“Le spectacle est sans conteste agréable à regarder mais si les pratiquants sont de plus en plus nombreux, on va avoir du mal à régler la circulation”, s’inquiète déjà Oun Sam An, chef du quartier de Chaktomuk, arrondissement de Daunh Penh. “Et cela pourrait provoquer des accidents si l’on regarde le ciel plutôt que droit devant soi quand on conduit”, met-il à nouveau en garde, déplorant par ailleurs que les pelouses pâtissent de ces jeux innocents. Alors, même si aucun arrêté n’a été récemment publié par la municipalité, les autorités expliquent néanmoins intervenir pour sauver le gazon public. Soun Savath, deuxième chef adjoint du quartier Bassac, précise tout de même que “le cerf-volant est tellement ancré dans la culture cambodgienne qu’il est difficile d’interdire aux habitants de les faire onduler à la guise du vent.”
Des jeunes venus de province profitent de cette mode retrouvée pour s’improviser vendeurs. Sophea, un Kompongchamois de 26 ans, s’est constitué un stock de cerf-volant au marché O’Russey qu’il revend au jardin Hun Sen. “Je peux gagner entre 10 et 20 000 riels par jour. Je les vends entre 4 000 et 15 000 riels pièce. Mais les policiers et responsables des services de propreté de la ville me réclament au moins 10 000 riels par jour”, déplore-t-il. Une accusation que réfute le responsable de la police du quartier de Chaktomuk. “Mes hommes n’oseraient jamais faire ça! En revanche, ces pratiques sont celles des gardiens des jardins”, accuse-t-il à son tour, prévenant qu’en cas de complète anarchie, ses services se chargeraient de rétablir l’ordre...
Ung Chamrœun