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 La jeunesse fanée des petits vendeurs de fleurs

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Thaïlande - Cambodge
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MessageSujet: La jeunesse fanée des petits vendeurs de fleurs   La jeunesse fanée des petits vendeurs de fleurs EmptyVen 25 Aoû - 8:45

Société - La jeunesse fanée des petits vendeurs de fleurs


25-08-2006
Cambodge Soir - Des yeux implorants qui vous fixent, une main qui tend un panier en plastique rempli de fleurs, des plaintes qui s'échappent dans un murmure... La nuit est pourtant déjà bien entamée quand cette petite fille vous propose une rose rouge à 1 000 riels ou un bracelet de jasmin. Elle se faufile entre les tables et insiste un peu plus auprès des amoureux. Quand ces derniers l'ignorent, elle finit par s'échapper et disparaît dans la nuit. Ce scénario se reproduira jusqu'à tard, très tard dans la nuit. Pendant sa “tournée”, la petite fille de 10 ans visitera une dizaine de bars et restaurants, son bouquet de roses dans les bras.

Ces enfants, garçons et filles, sont de plus en plus nombreux à débarquer à Phnom Penh quand le soleil décline. A trois sur une moto, avec le grand frère comme conducteur, ils sillonnent les rues de la capitale. Tantôt dans un restaurant de soupes, tantôt dans un bar fréquenté par les étrangers, il est possible de les croiser un peu partout.

Près du monument de l'indépendance, Pho Thœun et Peun Vanneth, tout deux âgés de 15 ans , grimpent sur la moto de leur frère qui les attend à la sortie d'un restaurant. L'adulte dit être très pressé. Il ne faut pas perdre de temps car les deux jeunes garçons n'ont encore rien vendu. Bon gré mal gré, il accepte de leur laisser un court répit, le temps de quelques questions. Assis sur un banc, à moitié caché derrière le bouquet de roses qu'il ne lâchera pas une minute, Pho Tœun parle d'une voix fatiguée. Lui et d'autres enfants arrivent à Phnom Penh vers 5 heures du soir et commencent toujours par vendre des fleurs au bord du fleuve. C'est là que se retrouvent les “khmeng steav”, ces “jeunes branchés” de la capitale en début de soirée. Les jeunes couples cambodgiens sont ses meilleurs clients, assure-t-il. Ensuite, lui et Peun Vanneth font la tournée des restaurants. “A certains endroits, les gardiens nous traitent de parasites et nous empêchent de rentrer”, lâche-t-il timidement. Il tient tout de même à préciser que son grand frère le suit partout. Peun Vanneth quant à lui hésite moins à parler de ses problèmes. Il évoque un travail “honteux et miséreux” qui le fatigue beaucoup, pour seulement 3 000 ou 4 000 riels par jour. “En plus, il arrive des jours où je n'ai rien à manger”, se lamente- t-il. “Pendant que nous travaillons, les riches boivent des bières, mangent dans de bons restaurants, possèdent de belles motos et de belles voitures...”, relève-t-il amer. S'il continue d'aller à l'école dans la journée, il est conscient des répercussions de la fatigue sur son travail. “Je ne travaille pas bien en classe. J'ai du mal à me concentrer car je suis obsédé par l'idée de rapporter de l'argent à ma famille”, confesse-t-il. Pendant ces longues nuits, il arrive parfois qu'il reprenne espoir. “Un jour un client chinois m'a donné 10 dollars pour quatre fleurs et m'a dit que j'étais un bon garçon, pas un parasite”, souffle-t-il en esquissant un sourire.

“C'est vrai que ces enfants sont à plaindre, mais certains m'ont aussi causé des problèmes. Parfois ils volent des plats sur les tables ou ennuient les clients en insistant trop longtemps auprès d'eux. Ces troubles nuisent à mon commerce”, souligne Vann Dara, patron du restaurant Rakmei Bœngkak. Il avoue être “obligé” de leur interdire l'entrée...

A minuit, tous les petits vendeurs se retrouvent au marché Silop, “là où on vend du jus de coco”. Une fois rassemblés, ils prennent leur dîner puis rentrent ensemble jusqu'au village de Prek Thmey, district de Kean Svay, dans la province de Kandal, dont nombre d'entre eux sont originaires. Un petit village qui s'est spécialisé dans la vente de fleurs.

Il est 2 heures du matin à Prek Thmey quand leurs petits yeux se ferment enfin. Mais le sommeil est de courte durée. Très tôt, une nouvelle journée commence avec les travaux dans les champs de jasmin, près du village. Depuis longtemps producteurs de fleurs, les habitants du village ont commencé par vendre le malis (le jasmin) dans les marchés locaux et parfois aussi à Siem Reap. Mais il y a quelques années, certains ont commencé à envoyer des enfants à Phnom Penh pour écouler les productions. Depuis que ces petits vendeurs sont revenus avec plusieurs milliers de riels en poche, l'idée a fait son chemin. Plusieurs familles ont décidé de suivre l'exemple, et cette nouvelle activité a gagné les villages alentour. Dans chaque famille, au moins un enfant vend des fleurs à Phnom Penh. Il constitue une source de revenu supplémentaire, devenue essentielle pour les siens. “Je suis inquiète pour la sécurité et la santé de mon fils mais l'argent qu'il gagne ainsi à Phnom Penh est vital pour notre famille”, confirme Hy Vantha, la mère de Pho Thœun, jetant un regard tendre vers le petit garçon, allongé sur une latte les yeux mi-clos. “Il revient fatigué et doit quand même travailler la journée, mais comment faire autrement? Nous avons besoin de cet argent”, ajoute-t-elle comme pour se justifier. Et elle insiste sur le fait que son fils “a lui-même décidé de faire ce travail et seulement pendant les périodes de vacances”. Si, selon cette mère de 5 enfants, son fils n'a jamais rencontré de problème majeur durant ses tournées à Phnom Penh, les accidents de la route restent la hantise. Les enfants des voisins de Hy Vantha viennent d'en faire la douloureuse expérience. Chan Thy, 15 ans, était assise à l'arrière de la moto de son frère avec un autre enfant quand l'accident s'est produit. Elle raconte d'une petite voix timide ses mésaventures. “Il était environ huit heures du soir, on venait de commencer notre tournée. Des voyous à moitié ivres sur une moto se sont rapprochés de nous et nous ont percutés”, précise t-elle. Si la petite fille a eu plus de peur que de mal, son grand frère arbore des plaies encore non cicatrisées sur son avant-bras et une partie de sa jambe. “Dès que j'irai mieux, je recommencerai à travailler”, affirme t-il, résigné.

Un peu à l'écart des autre maisons du village se dresse celle de Pho Sarath. Du haut de ses 16 ans, elle paraît bien plus mûre et plus âgée que les autres enfants vendeurs de fleurs. Elle fut parmi les premiers à être envoyés à Phnom Penh pour travailler. Au début, c'est un voisin qui lui a proposé de vendre le jasmin pour lui. Cette période fut douloureuse pour la jeune fille. Elle devait vendre beaucoup et se plier aux règles. Quand il estimait qu'elle n'avait pas fait un “assez bon chiffre”, il lui arrivait de la frapper. Pho Sarath devait aussi endurer les sautes d'humeur des clients. Les larmes aux yeux, elle se confesse. “Un jour, je suis rentrée dans un restaurant chinois. Il y avait déjà beaucoup de petits vendeurs comme moi. Une cliente s'est soudain mise à hurler qu'on lui avait volé son sac à main. Comme j'étais la dernière à être entrée, le propriétaire m'a tout de suite accusée. Il m'a dit qu'on allait me mettre en prison!” Sa voix s'étrangle, elle court se réfugier à l'intérieur de la maison. Quand elle revient, ses yeux sont rougis par les larmes qu'elle est allée verser. “Finalement la cliente a affirmé que ça ne pouvait pas être moi et ils m'ont relâchée. J'ai eu très peur. Depuis ce jour, je ne vends que dans les restaurants pour étrangers”, conclut-elle. Ces petits vendeurs doivent endurer les regards désapprobateurs de certains clients qui ont une très mauvaise image d'eux. Parmi ces enfants, vendeurs de journaux, de cassettes, de lunettes de soleil et autres, certains n'hésitent pas à chaparder ce qui traîne sur les tables. Leur groupe a ainsi gagné une mauvaise réputation, suscitant autour d'eux la méfiance. Difficile de distinguer ceux qui vont s'adonner à ces petits délits de ceux qui tentent juste d'écouler leurs stocks.

Pho Sarath a choisi de ne vendre qu'aux barangs et s'est mise à son compte, en achetant elle-même les fleurs qu'elle revend à Phnom Penh. Elle a aussi commencé à suivre des cours d'anglais, et explique qu'elle vend mieux depuis qu'elle peut échanger quelques mots avec les étrangers qu'elle croise sur les quais. Mais à 16 ans, elle devient trop grande et commence à avoir honte d'exercer ce travail. Elle parle de s'arrêter l'année prochaine. Ear Srey Noch, sa jeune voisine, aimerait elle aussi être libre de “prendre sa retraite” quand elle le souhaite. Mais la pression familiale est trop forte. “J'aimerais bien m'arrêter mais ma tante refuse. Elle dit que je suis une bonne vendeuse”, soupire la jeune fille de 14 ans aux cheveux légèrement ondulés.

Des mains qui traînent, les insultes, la fatigue, les humiliations... La liste s'allonge à chaque témoignage. Des conséquences, physiques et psychologiques, qui marqueront à vie cette petite main d'œuvre fragile. Sim Malis, chef du village de Prek Thmey, en a conscience mais s'estime totalement impuissant devant un phénomène qui se généralise à toutes les familles. Selon lui, le “métier” est né il y a une dizaine d'années et ne concernait au départ que peu de familles, il s'est aujourd'hui beaucoup développé avec la croissance des bars et restaurants de Phnom Penh. “L'âge moyen de ces enfants est compris entre 8 et 15 ans”, précise Sim Malis, qui a lui-même envoyé une de ses filles travailler en ville. “Ces enfants seraient une proie idéale pour les voleurs qui n'hésiteraient pas à les détrousser”, reconnaît-il. Si le chef du village de Prek Thmey ne dispose d'aucun moyen pour enrayer le phénomène, il n'en voit même pas la nécessité. “Mais il n'y a jamais eu de problème grave, c'est pourquoi on ne s’inquiète pas trop”, argumente-t-il.

Un travail considéré comme “positif” car rentable, une mauvaise connaissance des dangers ou plutôt un aveuglement volontaire et collectif... L'exploitation familiale existe-t-elle?

Les réponses des ONG diffèrent. Pour Yim Lo, directeur du Cambodia Center for Protection of Chidren's Rights ( CCPCR), “on ne peut pas parler d'exploitation car c'est un choix de la famille et parfois même des enfants. Ces derniers sont exploités s'ils travaillent pour d'autres, si on les pousse au-delà de leurs forces, si on utilise la violence contre eux, ou si on les insulte”. Une définition qui n'est pas partagée par tous. Ly Sophat, directrice de Mith Samlanh, ONG spécialisée dans l'aide aux enfants des rues, affirme le contraire. “Même si c'est un oncle, un frère, ou un père qui pousse l'enfant à travailler, c'est une exploitation. Ils savent que les enfants vont inspirer de la pitié et ils utilisent leur fragilité”, estime-t-elle, déplorant qu'ils deviennent ainsi des cibles de choix pour les pédophiles. Elle met en avant un problème de société, celui de la conception de la famille et de l'enfant. “Les parents doivent préparer la venue d'un nouveau-né. Dans les pays occidentaux et dans les riches familles cambodgiennes, ils sont choyés et protégés jusqu'à un âge avancé. On leur donne la becquée jusqu' à 8 ans! Ici, les familles n'ont pas la même approche”, souligne-t-elle. Un travail de longue haleine serait donc nécessaire, pour impulser une évolution des mentalités.

Un projet est en chantier au ministère des Affaires féminines pour aider ces familles à mieux connaître les dangers du travail de nuit à Phnom Penh. Khim Chamroeun, secrétaire d'Etat au ministère, parle de la mise en place d'un nouveau comité pour l'“égalité des chances et la promotion des valeurs familiales”. En informant les parents des dangers du trafic d'êtres humains, notamment des jeunes filles, le ministère espère ainsi les dissuader d'envoyer leur progéniture travailler dehors tard le soir. Mais face au délicat problème des petits vendeurs de fleurs, aucune solution concrète n'a encore été formulée.

Pour les clients étrangers et cambodgiens, entre éthique et compassion, leur cœur balance. Donner est-ce cautionner? Refuser est-ce ignorer? Les informations manquent et les questions restent en suspens. Le travail de nuit des enfants reste un phénomène peu évoqué, encore trop plongé dans l'obscurité des rues de Phnom Penh.

Ung Chansophea et Julie Dao Duy
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