Xavier Darcos, ministre délégué à la Coopération, au Développement et à la Francophonie, réagit à l'appel d'une famille mourmelonnaise (notre édition du 14 décembre) pour la réouverture de l'adoption au Cambodge.
Le film Holy Lola et les dossiers bloqués pour onze familles d'adoptants français ont relancé le débat sur l'adoption au Cambodge, fermée depuis près de 18 mois par le gouvernement français. Y-a-t-il à votre sens de réelles dérives dans ce pays pour justifier une telle décision ?
Xavier Darcos : Oui. Je me suis rendu au Cambodge la semaine dernière pour examiner la coopération entre nos pays. La question des adoptions a été au cœur des discussions avec tous les membres du gouvernement cambodgien que j'ai rencontrés. Nous avions suspendu les adoptions en provenance de ce pays en juillet 2003 car nous n'avions plus l'assurance de la fiabilité des procédures cambodgiennes. Nous ne pouvions pas garantir que les enfants adoptés n'avaient pas été achetés ou soustraits à leurs familles contre leur gré. Il y a eu notamment le cas assez médiatisé d'une personne, aujourd'hui en prison aux Etats-Unis, qui a gagné des millions de dollars dans de tels trafics. Les autres pays européens ou d'Amérique du Nord ont pris des mesures de suspension similaires.
Quels objectifs poursuivait la mission interministérielle qui s'est rendue au Cambodge du 12 au 21 décembre et que vous avez rencontrée sur place le week-end dernier ?
X. D. : Cette mission visait essentiellement à examiner les procédures cambodgiennes (fiabilité des actes de naissances, fonctionnement administratif, gestion des orphelinats, etc.) et l'état d'avancement de la réforme de l'adoption qui permettra à ce pays d'adhérer à la convention de la Haye. Elle a également examiné ce que faisaient les autres pays européens et les Etats-Unis. La mission est rentrée à Paris depuis quelques jours et le gouvernement examinera rapidement ce qui peut être fait.
Dans quelles conditions et à quelle échéance le gouvernement français pourrait-il accorder de nouveau des visas d'adoption d'enfants cambodgiens ?
X. D. : Il faut que nous soyons certains que les enfants adoptés n'ont pas été abandonnés par leurs familles dans des conditions contraintes. La solution idéale est que l'administration cambodgienne chargée de ces dossiers puisse à nouveau fonctionner dans des conditions satisfaisantes. Notre action de coopération jouera un rôle important, en formant les cadres et en renforçant les procédures pour éviter les risques de corruption de fonctionnaires cambodgiens par des intermédiaires peu scrupuleux. Les membres du gouvernement cambodgien que j'ai rencontrés m'ont tous assuré de leur soutien. Si cette solution prenait trop de temps, nous devrons essayer de trouver d'autres voies, par exemple sur la base d'enquêtes sociales parallèles sur l'origine des enfants. La mise en place de l'agence internationale de l'adoption en 2005 nous aidera beaucoup dans cette tâche.