28 JANVIER 2005
L'OPPOSITION A THAKSIN AFFAIBLIE PAR UN COMBAT DES CHEFS
A quelques jours du scrutin du 6 février, les chances du Parti démocrate s'amenuisent. Ses principaux responsables se mettent des bâtons dans les roues, pour le plus grand profit de la formation du Premier ministre.
A la veille des élections législatives du 6 février, le Parti démocrate thaïlandais doit se battre contre deux ennemis : le parti de la majorité au pouvoir, le puissant Thai Rak Thai [de Thaksin Shinawatra], et lui-même. La façon dont les démocrates ont mené campagne et les stratégies mises en œuvre en disent long sur la relation difficile entre le leader du parti, Banyat Bantadtan, et le mouvement des New Leaves, dirigé par le numéro deux démocrate, Abhisit Vejjajiva. L'unité du parti est en lambeaux depuis que ce dernier s'est présenté contre Banyat Bantadtan, lors des élections internes de 2003.
L'apparition d'un clivage en son sein était bien la dernière chose dont avait besoin ce parti. Il n'a pas encore admis que même ses chefs ne se font pas beaucoup d'illusions sur l'issue du scrutin. Ces derniers attendent des électeurs qu'ils leur donnent au moins 201 des 500 sièges à pourvoir à la Chambre des représentants, ce qui montre bien leurs modestes ambitions. Cependant ces 201 sièges leur permettraient non seulement de prendre la tête de l'opposition, mais aussi d'avoir assez de poids pour s'opposer au Premier ministre. Selon les analystes politiques, leur meilleur score pourrait être réalisé à Bangkok, où les habitants ont déjà manifesté leur mécontentement à l'égard du Thai Rak Thai en élisant en août dernier le candidat démocrate, Apirak Kosayodhin, au poste de gouverneur.
Derrière ce succès se cache un homme, Abhisit Vejjajiva. Le jeune politicien est le rassembleur de voix des démocrates. Depuis plus de dix ans, il suscite beaucoup d'admiration parmi les électeurs de Bangkok, et cela alors même que la popularité générale du parti est en baisse. Pour certains observateurs, Abhisit Vejjajiva aurait pu être à nouveau le joker des démocrates, en amenant Bangkok à leur donner 20 sièges lors des prochaines élections, mais l'idée de le voir continuer à mener toute la campagne du parti dans la capitale n'a pas semblé enthousiasmer le patron du parti, Banyat Bantadtan, ni son homme lige dans la course à la présidence démocrate en 2003, le secrétaire général et responsable des élections Pradit Pattaraprasit.
Le conseil de direction du parti – qui est entre les mains du New Decade, le mouvement conduit par Banyat Bantadtan – a décidé il y a trois semaines de modifier le plan de campagne démocrate dans les différentes circonscriptions et mis entre de nouvelles mains la supervision des activités électorales à Bangkok et dans d'autres régions du pays. Ce changement intervient à un moment où le Thai Rak Thai connaît un regain de popularité grâce à sa gestion de la crise provoquée par le tsunami et à l'aide qu'il a apportée aux survivants et aux familles des victimes.
Le Parti démocrate aborde donc ces élections avec un certain manque de préparation, surtout en ce qui concerne la définition de son orientation politique. D'autant que l'une de ses têtes pensantes, Anek Laothamatas, qui a contribué à la rédaction d'un programme, a quitté la formation, il y a cinq mois, pour former le parti Mahachon. Au dire de Banyat Bantadtan, Anek Laothamatas a “ouvert le coffre-fort démocrate et emporté [notre] programme”. Il n'y a rien d'étonnant à ce que la déclaration de politique générale du Parti démocrate ressemble à celle du Mahachon, puisque Anek Laothamatas est le concepteur des deux. Quelques ajustements ont certes été faits, mais on retrouve dans les deux camps le même objectif : combattre la séduction exercée par le populisme du Thai Rak Thai.
Courrier International