LE TEMPS DES COMPROMIS

LE TEMPS DES COMPROMIS

Les conflits entre Rainsy et Ranariddh profitent à qui ? N’est-elle pas la question fondamentale qu’il faut répondre avant de chercher à trouver une solution ?



Ces conflits profitent-ils à la consolidation de la nation cambodgienne ? Au peuple cambodgien qui se trouve actuellement sans défenseurs au parlement ? Est-ce dans les intérêts géostratégiques des grandes puissances ? En particulier à ceux des USA et de la Chine ?



Hanoi, derrière ses fantoches du clan Hun Sen, n’en profit-t-il pas pour accélérer la vietnamisation économique du Cambodge à l’Est ? Avec la complicité de la Thaïlande à l’Ouest ?



Pourquoi les grandes puissances n’interviennent-elles pas aussi puissamment au Cambodge, comme elles viennent de le faire en Ukraine pour imposer la liberté, la démocratie et l’indépendance nationale ?



Avons nous su tirer les leçons du silence assourdissant des grandes puissances et de l’ONU devant les massacres et les crimes commis au Cambodge depuis le 23 décembre 1991 ? Pourquoi « La culture de l’Impunité » reste-t-elle toujours en vigueur au Cambodge et tend-t-elle à devenir pérenne ? Un homme d’affaire cambodgien est un témoin important à charge dans une affaire de corruption. Récemment, il est mort mystérieusement par empoisonnement au retour d’un banquet[1]. Pourquoi le pouvoir fantoche oblige-t-il la famille à incinérer aussitôt le cadavre avant toute investigation ? Pourquoi la famille et tous les témoins sont obligés, sous la menace, de se cacher ? Pourquoi le silence des médias ? La justice peut-elle fonctionner normalement avec des cas pareils ?



En Ukraine, dans l’assassinat d’un journaliste, le nouveau gouvernement vient d’avoir des preuves sur la complicité des policiers à l’échelon de colonel de l’ancien gouvernement. Cité par le tribunal comme témoin, le précédent ministre de l’Intérieur se suicide. Est-ce concevable avec le pouvoir actuel à Phnom Penh ?



Est-ce que le Japonais Akashi était venu pour aider le Cambodge à devenir indépendant du Vietnam ? Ou au contraire pour aider Hanoi à vietnamiser le Cambodge ? Existe-t-il un pays qui dépense allègrement plus de deux milliards de $US, comme le Japon pour l’opération UNTAC, pour des raisons humanitaires ? [2]



Après l’opération UNTAC, le Japon ne favorise-t-il pas la construction des autoroutes nécessitant la construction de coûteux ponts entre Phnom Penh et l’ex-Saigon ? Est-ce pour que le commerce extérieur du Cambodge reste toujours tributaire du Vietnam ? Comme durant la période coloniale ? Pourquoi la seule route directe Phnom Penh - Kompong Som RN4 (offerte et reconstruite par les USA) est-elle à péage ? Pourquoi pénaliser notre commerce extérieur par notre port ?



Pourquoi l’essence et le gaz cambodgiens coûtent 50 % plus chers que chez nos voisins ? Cela malgré les immenses aides internationales ?



Pourquoi le Japon privilégie-t-il les axes routiers Est-Ouest ? Alors que nous avons besoin avant tout, des routes entre Phnom Penh et nos provinces et nos villages les plus reculés ? Pourquoi les accès sont toujours extrêmement difficiles à nos provinces du Nord et du Nord-Est ? En particulier à Preah Vihear ?



Pour pouvoir piller tranquillement les richesses de nos provinces du Nord-Est, le Vietnam a besoin des routes Est – Ouest. Ces routes serviront aussi à développer les ports du Centre – Vietnam. Qui aidera dans ce pillage des richesses de nos provinces du Nord-Est ? Le Japon ? Pourquoi le Japon qui a dépensé plus de 2 milliards de $US lors de l’opération UNTAC et qui depuis est le pays qui fournit annuellement les aides financières les plus importantes est toujours le pays qui investit le moins au Cambodge ?



Pourquoi Hanoi a-t-il décidé de confier à la compagnie US Texaco Chevron avec participation japonaise, le monopole de l’exploitation de nos richesses en hydrocarbure offshore ? Pourquoi, dans la situation actuelle, une compagnie britannique vient-elle de venir demander d’explorer nos richesses en hydrocarbure, cette fois-ci à l’intérieur de nos terres ?



Pourquoi la société française Elf, maintenant Total, qui avait le monopole d’exploration et d’exploitation de nos richesses en hydrocarbures offshore avant 1970 en est-elle exclue ? Pourquoi au Cambodge, c’est la société vietnamienne Sokimex qui sera la principale bénéficiaire de nos richesses ? Pourquoi cette société vietnamienne est-elle devenue un véritable Etat dans l'Etat ? Avec des possibilités financières de plusieurs milliards de $US ? Pourquoi n’y a-t-il pas encore de projet pour la construction d’une raffinerie de pétrole au Cambodge ? Pourquoi tant de brouillards sur ces questions ? A quand la transparence ? Qui profiteront des milliards de $US générés par ces richesses ? Après nos forêts, nos poissons, nos pierres précieuses etc. est-ce maintenant au tour de l’exploitation de nos richesses en hydrocarbure au profit principalement du Vietnam ?



Le Cambodge peut-il ignorer les conflits d’intérêts entre les USA et la Chine ? Le Cambodge de Sihanouk croyait aux promesses de Pékin et de Hanoi. Lon Nol aux promesses des USA. Puis les Khmers Rouges aux promesses de la Chine. Que deviennent maintenant ces belles promesses ? Avons-nous déjà oublié la lettre de Sirik Matak[3] ?



Le pouvoir aux mains du clan des fantoches autour de Hun Sen peut-il tenir si longtemps sans le soutien naturellement de Hanoi, mais aussi de l’ex-URSS et puis depuis les Accords de Paris d’octobre 1991, avec les aides et soutiens de toutes les grandes puissances et de l’ONU ?



S’il y a quelques progrès malheureusement trop lents dans l’évolution de la société et de l’économie cambodgiennes, ne sont-ils pas dus en grandes parties aux luttes du peuple dans des conditions extrêmement difficiles ? Mais pourquoi le commerce extérieur du Cambodge avec nos voisins est-il toujours déficitaire à 90 % ? Pourquoi le Cambodge reste-t-il toujours inondé par des produits étrangers et plus particulièrement par ceux de nos voisins ? Pourquoi, pour construire les routes et les ponts au Cambodge, le Japon ne soustraite jamais avec des sociétés cambodgiennes ? Pourquoi, dans ces chantiers les Japonais n’utilisent presque exclusivement que les coolies femmes cambodgiennes pour les travaux les plus durs ?



Au sujet de la route RN7 sur le tronçon Stung Treng vers le Laos. Cette route est très importante pour le commerce extérieur de la Chine centrale qui a comme débouché naturel le port de Kompong Som. Par conséquent les gesticulations verbales du fantoche Hun Sen et des fantoches laos ne sont que du vent soufflé par Hanoi. Le Vietnam n’a aucun moyen pour s’opposer à la Chine.



Pourquoi projette-on de construire des zones industrielles principalement à nos frontières de l’Est et de l’Ouest ? Pour que la main-d’œuvre cambodgienne, toujours principalement illettrée, serve-t-elle à engraisser les capitaux étrangers, en particulier ceux de nos voisins ? Les Cambodgiens restent-ils toujours les prolétaires de nos voisins ? Les produits finis sont-ils exportés par des ports cambodgiens ou par des ports vietnamiens ou thaïs ? La pollution est pour qui ? Y a-t-il au préalable la construction des infrastructures comme le système d’égout et des usines pour traiter les eaux usagées, les déchets industriels et domestiques ? Etc. Etc.



Ne constate-t-on pas déjà que nos provinces de l’Est sont déjà économiquement et en énergie rattachées au Vietnam ? Et que nos provinces de l’Ouest sont déjà rattachées de la même manière à la Thaïlande ?



Qui s’occupe du développement de notre langue ? A quand l’utilisation de notre langue sur Internet ? A quand le nouveau dictionnaire de la langue cambodgienne ? A quand la prise de conscience de l’importance fondamentale des traductions en cambodgien des œuvres maîtresses de la culture mondiale à tous les niveaux ? A quand la publication des cartes détaillées du Cambodge ? A quand l’accès des Cambodgiens à la culture mondiale ? Sans développement de notre langue, nos compatriotes de l’Est ne sont-ils pas obligés d’apprendre le vietnamien pour avoir accès à la culture mondiale ? Ce même phénomène ne s’applique-t-il pas aussi à l’Ouest avec la langue thaïe ? Avons-nous déjà oublié comment le pouvoir colonial et maintenant Hanoi vietnamisent la Cochinchine. Les Cambodgiens en Thaïlande ne sont-ils pas en train de perdre leur identité culturelle faute de culture écrite ?



Voilà les grands problèmes que doivent faire face le peuple et les patriotes cambodgiens[4].



De nos jours, qui a un programme pour pérenniser notre culture et notre nation ? Qui a un programme pour 20, 30 ans ou plus ? Est-ce des objectifs tactiques pour trois ou quatre ans sont suffisants ? Les dirigeants qui ont réussi à maintenir l’indépendance de leur nation disent : « Penser en stratège et agir en tacticien ». C’est-à-dire voir loin, mais en s’adaptant aux conditions présentes et en assumant les legs du passé. Les Allemands disent que l’avenir appartient à ceux qui ont la mémoire la plus longue.



Sans un programme pour la longue durée, ne risquons-nous pas de toujours nous lamenter sur notre passé et d’accuser indéfiniment ce qui est révolu ?



Maintenant, n’est-il pas temps de négocier un compromis entre Rainsy et Ranariddh ? La solution ne se trouve-t-elle dans la proposition du Roi Père en 5 points du 10 février 2005, comme base de discussion ? Beaucoup de membres et sympathisants du FUNCINPEC et aussi du PPC ont voté pour le SRP en juillet 2003. Mais de là à rejoindre le SRP, c’est une autre histoire.



Au sujet des négociations, pourquoi jusqu’à maintenant, nos hommes politiques ne savent-t-ils négocier qu’au sommet et en public ? Pourquoi cette exception cambodgienne ? Partout ailleurs, même dans les négociations commerciales, on commence d’abord par des rencontres préliminaires discrètes, voire secrètes, entre représentants des parties concernées. Chaque délégation comprend toujours un certain nombre de membres. C’est seulement, lorsque les accords sont possibles et / ou en vue qu’interviennent les chefs plus ou moins officiellement. Jusqu’à maintenant Hanoi a pu négocier derrière le visage de son fantoche Hun Sen. Ce qui fait que Hun Sen, un inconnu avant 1987, devient maintenant « un homme fort » pour certains. Maintenant Hun Sen se déplace avec des dizaines de conseillers. Qui sont ces conseillers ? Est-ce les troupes vietnamiennes ont réellement évacué le Cambodge en 1989 ? [5]



Cette incapacité de commencer les négociations par des rencontres discrètes entre délégations n’est-elle que la traduction dans les faits de cette incapacité à structurer une organisation avec un véritable état-major solidaire et une discipline librement acceptée par les membres ? Détruire est facile, construire est difficile et demande du temps.



En conclusion, la seule issue possible n’est-elle pas une solution de compromis entre le SRP et le FUNCINPEC pour que les Cambodgiens puissent de nouveau lutter de plus en plus efficacement contre le pouvoir toujours tenu par le clan des fantoches autour du criminel Hun Sen[6] ?

Suite


Notes : This article is available into english upon request.

[1] Affaire de l’homme d’affaire Kim Kheang du promoteur Yang Sy construction. “One Sam Rainsy Witness Dies, Another Goes Missing”, Cambodia Daily, 18 February 2005.

[2] Lire « Japon – Vietnam, une Relation sous Influence, par Laurent Schwab et Guy Faure, Ed. IRASEC, France et Bangkok 2004.

[3] Cette lettre est disponible en écrivant à khemarajati@sympatico.ca.

[4] Rappelons que les communistes vietnamiens, depuis le 3 février 1930, ont appliqué minutieusement le projet de la vietnamisation du Cambodge dans le Programme Politique du Parti Communiste Indochinois devenu en 1951 Parti Communiste du Vietnam, avec des annexes au Laos et au Cambodge. Ils ont commencé d’abord par unifier culturellement du peuple vietnamien avec les encouragements du pouvoir colonial qui a imposé l’utilisation de la langue écrite romanisée (quoc ngu) dans les études scolaires comme dans l’administration. Les communistes vietnamiens ont créé rapidement des « Associations pour le Développement du Quoc Ngu ». Ce qui fait que dès leur prise de pouvoir en 1945, ils ont pu vietnamiser l’ensemble de la langue administrative, politique scolaire, universitaire et intellectuelle. C’est cette unité linguistique qui est la base essentielle de l’unité vietnamienne.

[5] « Reste enfin le retrait des forces vietnamiennes officiellement effectif depuis le 26 septembre (1987) à minuit. Hanoi avait envoyé à partir de 1979 quelque 120 000 hommes au Cambodge. L’an dernier (1988), le Vietnam fit état du rapatriement de 50 000 soldats. Combien le furent-ils au cours du mois de septembre dernier ? Faute d’un mécanisme de contrôle, rejeté par Hanoi, il est impossible de le savoir. Il semble cependant assuré que plusieurs milliers de soldats vietnamiens sont restés sur place sous uniforme cambodgien. Depuis longtemps, en effet, l’état-major vietnamien avait pris soin d’implanter de la sorte un régiment par province. S’il en est effectivement ainsi, Hanoi disposerait au Cambodge d’une force d’à peu près équivalente à celle des Khmers rouges, dont le nombre se situe aux alentours des 30 000. Cette infiltration permettra-t-elle de faire face à une résurgence massive de la guerre civile ? A contrario, la favorisera-t-elle ? Toujours est-il que l’armée dont dispose le Premier ministre Hun Sen, forte de 50 000 hommes, a souvent été secouée par des mutineries. La situation est loin d’être claire. »



« Défense Nationale, problèmes politiques, économiques scientifiques militaires » novembre 1989, page 166.



L’article passe sous silence les militaires vietnamiens qui se déguisent en civils. C’était déjà le cas après les accords de Genève de juillet 1954. Les communistes vietnamiens utilisaient le coiffeur du Roi comme émissaire. Lors du coup d’Etat de juillet 1997, l’Armée Populaire du Vietnam (APV) intervenait ouvertement sous uniforme des garde-corps de Hun Sen et en distribuant des uniformes et armes aux militaires vietnamiens en civil. Nhiek Bun Chhay le dit dans son livre. Les troupes qui se faisaient décimer en montant à l’assaut d’O Smach, derrière les enfants cambodgiens de 10 ans soûlés, en août septembre 1997 étaient des meilleures unités de choc de l’APV. Malheureusement les vainqueurs d’O Smach semblent oublier d’honorer la mémoire des héros morts lors de ce coup d’Etat et en remportant la victoire retentissant d’O Smach.



Rappelons que la société vietnamienne Sokimex a le monopole pour la fourniture des uniformes de l’armée et de la police cambodgienne. Les Cambodgiens connaissent également les noms des officiers vietnamiens, dont certains de haut rang, dans l’armée cambodgienne.



Au fait qui défendent la forteresse de Tuol Krasaing ? Qui paie l’entretient de cette forteresse ? En juillet 2003, à Takhmau, ville la plus proche de cette forteresse où est inscrit le fantoche Hun Sen, les Cambodgiens ont répondu en votant massivement contre le PPC.



Lire aussi « Task force on terrorism & unconventional warfare, House Republican Research Committee, US House of Representatives, Washington 20516, April 26, 1990.



La diffusion du texte ci-dessus survient à peu près en même que la dislocation de l’URSS. La Russie ne constitue plus un danger pour les USA. C’est la puissance de la Chine qui devient préoccupante pour Washington. D’où changement de la stratégie US à 180°.

[6] Si on veut lutter réellement contre la corruption, n’est-il pas plus logique de lutter d’abord contre les plus corrompus ? Ceux qui détiennent des centaines de millions de $US ? Certaines fortunes ne dépassent-elles pas déjà le milliard de $US ? Pourquoi ne pas s’attaquer aux capitaux de la société vietnamienne Sokimex qui se chiffrent à plusieurs milliards de $US ? Aux monopoles exorbitants de cette société vietnamienne ?