Chronique Asie du 14/10/2005
Cambodge, une succession royale en douceur
Il y a un an, l’abdication du roi Norodom Sihanouk avait surpris le Cambodge, qui ne s’attendait pas à devoir choisir un successeur avant la mort du souverain. Les observateurs se sont même demandé quel roi ferait le prince Sihamoni, un inconnu qui avait passé toute sa vie d’adulte hors du pays. A l’heure où le nouveau roi fête le premier anniversaire de son règne, les opinions lui sont plutôt favorables: même s’il n’est pas aussi flamboyant que son père, Sihamoni s’en tire très bien.
Il s’est d’abord fait connaître en multipliant les voyages en province et à l’étranger. Ainsi, en août dernier, il s’est rendu à Pékin pour sa première visite officielle en Chine, faisant ensuite un détour nostalgique par la ville de Tianjin, où il a étudié la danse dans les années 70. Dans le même registre, il envisage de se rendre à Prague l’année prochaine pour remercier les autorités tchèques de l’accueil qui lui a été accordé entre 1962 et 1975. C’est dans cette ville, en effet, qu’il a fait ses études.
D’autres événements lui ont facilité la tâche, notamment ses voyages en province. En juin, il a visité la région de Païlin, le fief des Khmers rouges, où il a été acclamé par 10 000 personnes. A l’occasion de son 53e anniversaire, des hauts responsables religieux des 24 provinces et villes du Cambodge l’ont béni lors d’une cérémonie suivant les rites bouddhiques. La population, qui avait eu droit alors à trois jours de congé, a démontré qu’elle avait bien accepté son jeune roi, dont la figure revêt un caractère quasi-religieux.
En tant que monarque constitutionnel, Norodom Sihamoni tente de rester au-dessus de la mêlée politique. Un exemple, sa réaction lorsque le dirigeant de l’opposition Sam Rainsy a été expulsé du Parlement et s’est exilé en Europe. Le député a écrit alors au roi en lui demandant d’intervenir. Mais Sihamoni a préféré rester en arrière plan, laissant son père gérer le conflit. Il est vrai qu’il ne possède pas l’autorité de Norodom Sihanouk qui a toujours fait preuve d’ un sens aigu de la politique et d’une profonde maîtrise du jeu du pouvoir.
Sihamoni, lui, préfère agir en douceur. Ses priorités sont l’environnement et l’humanitaire. Mais il sera difficile de ne pas assumer son rôle de médiateur face aux courants qui s’affrontent au sein de la société cambodgienne. Et, surtout, il ne sera pas facile de gérer les relations compliquées et ambiguës que la maison royale entretient avec le Premier ministre Hun Sen, un politicien habile qui n’a aucune sympathie pour la monarchie du Cambodge.
Any Bourrier
Article publié le 14/10/2005
Dernière mise à jour le 14/10/2005 à 08:10 (heure de Paris)