Restauration - Le chantier colossal du Baphuon enfin ouvert au public
08-05-2006
Cambodge Soir - Durant plus de dix années, au bout de la longue allée centrale située entre deux bassins, une barrière interdisait au visiteur tout accès aux niveaux supérieurs du temple-montagne Baphuon du Xe siècle. Seul un parcours aménagé au rez-de-chaussée permettait de contourner l’ensemble du colossal chantier dont on apercevait, au loin, le ballet des immenses grues. Désormais, la barrière fait place à un majestueux escalier de bois qui mène au pied du temple, là où a été aménagée une plate-forme. Quelques mètres plus loin, un toit de chaume abrite une exposition permanente en trois langues retraçant, à grand renfort d’illustrations, l’histoire de cet édifice ainsi que les travaux de dégagement et de restauration successifs dont il a fait l’objet.
Ce sont ces aménagements - permettant au visiteur d'admirer en toute sécurité une partie de ces travaux en cours sur le second étage du temple tout en les informant des enjeux du programme - qui ont été inaugurés vendredi soir, en présence d'Yvon Roé d’Albert, ambassadeur de France, Sisowath Panara Sirivuth, ministre de la Culture, Sou Phirin, nouveau gouverneur de Siem Reap, ainsi que des responsables de l’autorité Apsara.
Pour Pascal Royère, architecte membre de l’Ecole française d’Extrême-Orient (Efeo), et responsable de cet immense chantier depuis son lancement, “c’est un premier pas vers l’ouverture complète qui aura normalement lieu dans trois ans. Cette plate-forme permet aux visiteurs de comprendre comment une restauration se déroule, de regarder les ouvriers travailler tout en admirant, en toute sécurité, cette partie du temple à présent en fin de restauration”.
Démarré en 1995 grâce à des financements des ministères français des Affaires étrangères et de la culture, puis poursuivi dans le cadre du Fonds de solidarité prioritaire (FSP) sur le site d’Angkor, le chantier, confié à l’Efeo et mené en partenariat avec l’autorité Apsara, allait devenir l’un des plus célèbres et surtout l’un des plus médiatisés de tous les projets de restauration des temples du complexe entrepris ces dernières années.
Comme le soulignait le ministre cambodgien de la Culture, “le Baphuon est certainement l’un des plus importants temples de l’histoire angkorienne. Il était aussi le plus dégradé. Monastère sivaïte, il se caractérise par des transformations successives au gré des humeurs des rois angkoriens jusqu’à la dernière, colossale : la construction d’un énorme Bouddha couché sur le premier étage de la face ouest”.
Dans une première tentative de restauration, le Baphuon avait fait l’objet d’un démembrement partiel entre 1959 et 1971. Les quelque 300 000 pierres composant cet immense puzzle avaient été entreposées sur les dix hectares de forêt alentours. Le conservateur avait noté soigneusement l’emplacement de chacune des pierres sur ses carnets. Un mode d’emploi qui sera malheureusement détruit en 1975. Aussi, lorsque l’équipe de Pascal Royère s’attaque, en février 1995, au chantier de restauration, la tâche apparaît-elle insensée, herculéenne.
Pour l’ambassadeur de France, “ouvrir ce chantier aujourd’hui, alors qu’il n’est pas encore totalement terminé, permet au public de mieux comprendre cette tâche et d’en apprécier l'ampleur. C’est en même temps un hommage rendu à tous ceux qui ont travaillé sur ce site et collaboré à sa restauration”.
Frédéric Amat