Mise en place de comités disciplinaires - Un tour de vis contre les bonzes dilettantes
Cambodge Soir - Pour rehausser l’image du bouddhisme au Cambodge, et plus particulièrement à Phnom Penh, le vénérable Tep Vong, chef suprême de l’ordre Mohannikay, envisage de mettre sur pied des comités disciplinaires, un par arrondissement, qui auraient pour mission de veiller aux bonnes mœurs des religieux. Il a récemment réuni les responsables de pagodes de la capitale pour leur soumettre ce projet. Jusqu’à présent, ce type de structure existait seulement au niveau de la province et “ne regroupait que cinq bonzes, qui ne peuvent, de toute évidence, couvrir tous les problèmes rencontrés dans leur province”, explique-t-il.
Premier critère pour devenir juge de la bonne moralité de ses condisciples, selon le vénérable : posséder une très bonne connaissance des principes bouddhiques en général et des règles de discipline en particulier. Même si le pays est aujourd’hui en paix, fait-il valoir, la religion n’est pas pour autant débarrassée de mauvais éléments qui contreviennent sans vergogne au code de conduite bouddhique. Dans la ligne de mire des comités disciplinaires : ceux qui se rendront coupables de manquements au règlement ainsi que les imposteurs ayant pris le froc et provoquant des conflits au sein des pagodes.
Appliquer la règle à la lettre, voilà ce qui avait été décidé au cours du 14e congrès national des bonzes en septembre (cf CS 2364). Conscient que les religieux qui constitueront ces comités ne pourront seuls trancher les fautes commises par leurs pairs, Tep Vong entend coopérer avec les autorités locales et le ministère des Cultes. “Il est important que les bonzes soient des modèles pour leurs concitoyens. Et ceux qui seront épinglés pour leurs mauvaises attitudes seront priés de quitter le froc”, assure le vénérable, qui prévoit d’étendre l’initiative au reste du pays. Car, note-t-il, les mauvais élèves ne se dénombrent pas seulement à Phnom Penh. Ainsi, lors de la Fête des eaux, une vingtaine de bonzes originaires de province ont été interpellés par leurs supérieurs pour avoir osé “prendre du bon temps” au bord du fleuve. Le vénérable reconnaît que si les incidents ne se répètent pas chaque jour, ils marquent cependant l’esprit des gens. “Il suffit de quelques cas pour que la population nous catalogue et nous méprise.”
Hing Kim Than, sous-secrétaire d’Etat aux Cultes, applaudit au projet de Tep Vong, disant que son ministère attendait depuis longtemps qu’une telle démarche soit faite. “Il est vrai qu’il est très difficile de régler les problèmes afférents aux bonzes car cela relève de la religion. Mais si les comités prennent à cœur leur travail, les écarts de conduite chez les bonzes diminueront”, prédit-il. Un policier de Kandal estime pour sa part que prendre des sanctions contre les bonzes irrespectueux du dharma reste chose malaisée. “Quand il nous arrive d’arrêter un bonze, les gens nous reprochent immédiatement de ne pas respecter les religieux et d’être de mauvais bouddhistes”, se plaint-il, espérant que les comités disciplinaires accepteront de collaborer avec la police.
Sina, une fidèle de 42 ans, se réjouit du lancement prochain de cette opération, dénonçant le trop grand nombre de bonzes à “se comporter n’importe comment, et à adopter une vie d’oisiveté”. Plus catégorique, un achar de wat Langka estime que la société de consommation ne réussit tout simplement pas aux bonzes car elle est source de désirs. Par conséquent, “ils doivent apprendre à se détacher des choses matérielles, comme le suggère le Bouddha...”
Ung Chamrœun