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Poulet contre trains, riz contre avions : la Thaïlande encourage le troc Par Paris LORD
BANGKOK, 30 jan 2006 (AMI) - Combien faut-il de poulets pour acheter un avion de combat ? C'est l'une des questions sur lesquelles planchent des économistes thaïlandais alors que le gouvernement de Bangkok voudrait pouvoir troquer de la volaille et du riz contre des trains et des supersoniques.
Lorsque le 26 janvier, le Premier ministre Thaksin Shinawatra a lancé un appel d'offres en direction de l'étranger pour des "méga-projets" estimés à 44 milliards de dollars et visant à moderniser les infrastructures de la Thaïlande, il a dit que son administration était intéressée par des "mécanismes de financement" alternatifs.
Parmi les grands travaux en préparation figurent l'expansion du réseau de transport collectif dans la région de Bangkok, la création d'un système de gestion de l'eau pour l'ensemble du pays et la modernisation de la défense nationale. Par exemple, le ministère de la Défense pense à un troc pour l'achat d'avions de combat de Russie, de Suède ou des Etats-Unis.
Le gouvernement Thaksin est convaincu que l'acquisition par l'échange d'équipements aussi coûteux contribuera à maintenir le taux d'endettement extérieur à moins de 50% du Produit Intérieur Brut.
Bangkok envisage à cette fin de proposer des produits alimentaires de base, tels du sucre, du tapioca, du poulet ou des excédents de riz, pour régler au moins une partie de la facture des entreprises étrangères.
Une commission spéciale a été mise en place au ministère du Commerce. "Lorsqu'il y aura accord (sur le pourcentage du montant d'un projet susceptible de faire l'objet d'un troc), la commission prendra une décision sur le produit de base qui sera utilisé pour l'échange", a expliqué à l'AFP Tikhunporn Natvar du ministère du Commerce.
Les règles du jeu finales devraient être prêtes à la mi-février mais de nombreuses entreprises étrangères sont plus que sceptiques.
Nazir Rizk, qui dirige la filiale thaïlandaise du groupe français Alstom, a admis que le troc était "une solution" mais s'est demandé "si les gens l'accepteraient et comment tout ça serait mis en place".
"Nous ne faisons pas de troc. Nous vendons des trains. Nous ne pouvons pas revendre du poulet", a-t-il dit.
Lothar Herrmann, représentant en Thaïlande du groupe allemand Siemens, s'est lui aussi montré prudent : "nous attendons des informations claires du gouvernement dans les deux prochaines semaines".
Aat Pisanwanich, chef du centre d'études du commerce international à l'Université de la Chambre de commerce de Thaïlande, a pour sa part estimé que les exportations du pays pourraient souffrir de ce projet de troc à grande échelle.
Si une grande quantité de denrées de base était envoyée vers un autre pays comme paiement, ces stocks pourraient ensuite être écoulés à perte sur le marché, ce qui pourrait aboutir à un abaissement des prix des exportations normales de la Thaïlande, a-t-il dit.
Selon M. Tikhunporn, le gouvernement de Bangkok s'est déjà livré à du troc dans le passé avec les Philippines (riz contre engrais) et il propose en ce moment à la Chine des cargaisons régulières de riz contre la possibilité de construire une usine de tabac dans le nord de la Thaïlande.
AMI