samedi 25 mars 2006, 16h24
Ultime mobilisation contre Thaksin: 100.000 manifestants à Bangkok
BANGKOK (AFP) - Des dizaines de milliers de manifestants se sont rassemblés samedi soir à Bangkok dans un dernier effort pour obtenir le départ du Premier ministre thaïlandais Thaksin Shinawatra avant des élections anticipées la semaine prochaine, qui sont boycottées par l'opposition.
Un responsable de la police sur place a estimé à 100.000 personnes la foule rassemblée pacifiquement dans une grande avenue du centre de la capitale, non loin du siège du gouvernement.
Il s'agit du sixième rassemblement de ce type depuis le début du mois de février mais, selon des sources indépendantes, cette manifestation, qui devait se poursuivre dans la nuit, a atteint un record de participation.
Quelque 10.000 policiers étaient mobilisés pour assurer l'ordre et 10.000 autres étaient en état d'alerte, alors que les organisateurs, qui accusent M. Thaksin d'abus de pouvoir et de corruption, n'ont pas exclu de marcher vers sa résidence et de défiler dimanche sur Sukhumvit, la principale artère commerciale de Bangkok.
Non loin du rassemblement de samedi soir, 30.000 moines bouddhistes ont prié pour la paix et l'unité nationale alors qu'une partie de la population thaïlandaise redoute que la crise politique ne dégénère en violence avant les élections du 2 avril.
"Notre pays et la plupart des Thaïlandais qui sont bouddhistes souffrent du conflit politique actuel", a dit Chainaj Yatchimplee, président du réseau des associations bouddhistes de Thaïlande.
Peu avant 22H00 (15H00 GMT), l'un des leaders de la coalition anti-Thaksin, Sondhi Limthongkul, a lu une déclaration appelant le roi Bhumibol Adulyadej, 78 ans, immensément révéré en Thaïlande, à nommer un Premier ministre par intérim.
La foule, qui avait allumé des bougies, a répété les mots prononcés par M. Sondhi, un patron de presse de 58 ans.
Un peu plus tôt dans la journée, M. Thaksin avait rejeté l'option d'un chef de gouvernement nommé par le roi. "C'est totalement inapproprié. Cela voudrait dire rupture du système démocratique".
Thaksin Shinawatra, 56 ans, élu Premier ministre en 2001 et réélu triomphalement en 2005, est la cible d'une vague de contestation sans précédent depuis la vente par sa famille de toutes les parts qu'elle détenait dans Shin Corp, géant des télécoms qu'il avait fondé avant d'entrer en politique.
C'est Temasek, holding financier dirigé par l'épouse du Premier ministre de Singapour, qui l'a acheté le 23 janvier pour 1,9 milliard de dollars.
Pour tenter de désamorcer la crise, M. Thaksin a convoqué des élections anticipées qui sont boycottées par l'opposition parlementaire.
"Thaksin, va-t-en!", scandaient samedi soir les manifestants, alors que le rassemblement commençait, comme les précédents, dans une atmosphère de fête avec des groupes de jeunes jouant de la musique.
Ces manifestations sont organisées par une coalition extra-parlementaire de personnalités issues de la société civile représentant une partie des classes moyennes et des élites de Bangkok.
M. Thaksin reste populaire parmi les masses rurales en province et les couches défavorisées de la population.
Vendredi soir, devant 40.000 sympathisants, le Parti démocrate, principale formation de l'opposition, avait appelé M. Thaksin à démissionner pour permettre au roi de Thaïlande de nommer un Premier ministre neutre qui serait chargé d'organiser une réforme constitutionnelle avant des élections.