Scandale au sommet

Scandale au sommet



Le rituel est désormais bien rodé. Presque chaque semaine, des dizaines de milliers de Thaïlandais se regroupent sur la place Royale. Membres du réseau des ONG, très influent en Thaïlande, sympathisants de l'opposition démocratique, étudiants ou cadres, leur objectif est de faire tomber le Premier ministre Thaksin Shinawatra. Thaksin, qui se présentait en homme fort capable de gérer la Thaïlande comme une entreprise, se retrouve empêtré dans la pire crise politique de sa carrière. Le point de départ du scandale est la vente de 49% de son empire, Shin Corp, à Temasek, la holding d'Etat singapourienne dirigée par la belle-fille de Lee Kuan Yew, l'ancien homme fort de Singapour. Et le plus choquant est que cette vente (1,8 milliard de dollars) s'est effectuée au travers de sociétés écrans qui permettent à Thaksin de ne pas payer le moindre impôt sur les plus-values.
Pour les manifestants, il vit « ses dernières heures au pouvoir ». Et son parti, le Thai Rak, a connu sa première défection d'ampleur la semaine dernière : un ancien gouverneur de Bangkok, Chamlong, a fait volte-face en accusant Thaksin de corruption. Bien qu'affaibli, le Premier ministre thaïlandais conserve des atouts. La semaine dernière, la Cour constitutionnelle a rejeté une demande, émanant d'un groupe de sénateurs, d'ouverture d'une enquête parlementaire sur d'éventuels conflits d'intérêts entre sa position de Premier ministre et son rôle au sein de Shin Corp, l'un des premiers conglomérats (téléphone, médias, aviation) du pays. Et la révolte contre Thaksin reste pour l'instant circonscrite à la capitale, Bangkok.
Désormais, tous les regards se tournent vers le roi Bhumibol. A la fin de l'année dernière, celui-ci était intervenu à l'occasion de son discours anniversaire en affirmant que « chacun peut se tromper, y compris moi-même ». Un message aussitôt interprété comme une attaque indirecte contre Thaksin. Mais depuis, le roi reste silencieux.